À lire – Thinking in systems: a primer
« Managers do not solve problems, they manage messes »
Un système est un ensemble d’éléments organisé de façon cohérente en vue de remplir une fonction ou d’atteindre un objectif. On distingue principalement 3 grands types de systèmes :
- les systèmes simples, linéaires et prévisibles (ex. y = f(x)) ;
- les systèmes compliqués, systèmes simples reproduits plusieurs fois ;
- les systèmes complexes, non linéaires et imprévisibles (l’écologie, l’économie, la biologie).
Tout au long de nos études, le découpage de la connaissance en disciplines fragmentées, isolées et étanches les une aux autres nous a tous plus ou moins formatés à l’approche dite analytique. Méthode qui cherche à réduire un système, quel qu’il soit, à ses éléments constitutifs les plus simples afin de les étudier en détail et de comprendre les interactions qui existent entre eux. Puis, en modifiant un paramètre à la fois, d’en déduire des lois générales permettant de prédire les propriétés du système dans des conditions différentes.
Si cette méthode fonctionne parfaitement pour les systèmes simples et compliqués, il en va tout autrement lorsque l’on aborde des systèmes complexes… Car leur fonctionnement produit des propriétés qui n’appartiennent à aucune entité en particulier et ne résultent pas de la volonté de tel ou tel élément.
Pour simplifier :
- L’approche analytique s’intéresse à « De quoi est-ce fait ? » ;
- L’approche systémique répond à la question « Comment est-ce fait ? ».
L’approche systémique est un outil formidable pour le manageur, car l’entreprise est encore trop souvent considérée comme une entité qu’il faut découper en parcelles élémentaires afin de mieux en appréhender la… globalité. Résultat, des solutions qui sur le long terme provoquent parfois plus de dégâts qu’autre chose.
Pour changer durablement les choses, Donella Meadows nous invite à travers son ouvrage à réviser nos modèles sclérosés de pensée pour réfléchir globalement en agissant sur 12 leviers gradués du plus simple (produisant peu de résultats) au plus compliqué (beaucoup de résultats).
Note : Pour que cela soit plus compréhensible, j’ai illustré les 12 leviers avec un cas fictif, celui d’une ville située sur une presqu’ile, reliée au continent par une seule route ayant une seule voie de communication dans chaque sens. Le but : augmenter le trafic sans embouteiller la ville…
1 – LES CONSTANTES, LES QUANTITÉS MESURABLES, LES CHIFFRES
(Constants, parameters, numbers)
Augmenter le nombre de voies de circulation sur la seule route en espérant que l’augmentation de trafic entrant ne cré pas d’embouteillage dans la ville.
2 – LA DIMENSION DES STOCKS RÉGULATEURS PAR RAPPORT AUX FLUX
(The size of buffers and other stabilizing stocks, relative to their flows)
Créer de nouvelles rues dans la ville à la sortie de la route principale.
3 – LA STRUCTURE DES FLUX ET DES STOCKS
(Structure of material stocks and flows)
Optimiser la topologie des rues pour limiter les congestions.
4 – LA LONGUEUR DES DÉLAIS PAR RAPPORT À LA VITESSE DE CHANGEMENT DU SYSTÈME
(Length of delays, relative to the rate of system changes)
Mettre en place des itinéraires bis, qui allongent le temps et permettent de réguler le trafic.
5 – L’EFFET RÉGULATEUR DES BOUCLES DE RÉTROACTION NÉGATIVE
(Strength of negative feedback loops, relative to the effect they are trying to correct against)
Réduire sans légiférer (supprimer des places de stationnement par exemple) le nombre de voitures avant que la ville n’arrive à saturation.
6 – L’EFFET AMPLIFICATEUR DES BOUCLES DE RÉTROACTION POSITIVE
(Gain around driving positive feedback loops)
Développer le réseau des transports en commun.
7 – LES FLUX D’INFORMATION
(Structure of information flow)
Installer des panneaux électroniques indiquant en temps réel les conditions de circulation sur tous les axes de la ville pour permettre aux automobilistes de réagir avant les bouchons.
8 – LES RÈGLES DU SYSTÈME
(Rules of the system)
Réduire en légiférant le nombre de véhicules autorisés à pénétrer dans la ville (circulation interdite dans le centre ville, le WE, etc.), et augmenter les transports en commun.
9 – LE POUVOIR DU SYSTÈME DE SE CRÉER, DE S’AUTO-ORGANISER OU DE CHANGER SA STRUCTURE
(Power to add, change, evolve, or self-organize system structure)
Investir dans un système de feux rouges intelligents permettant d’agir automatiquement en temps réel sur la fermeture ou l’ouverture de certains axes en fonction de la densité du trafic.
10 – LES OBJECTIFS DU SYSTÈME
(Goal of the system)
Redéfinir le l’objectif initial de cet exemple qui était « augmenter le trafic en diminuant les embouteillages » par « augmenter les transports en commun et le bien-être des citoyens ».
11 – LA VISION DU MONDE OU PARADIGME QUI SOUS-TEND LE SYSTÈME
(Mindset or paradigm that the system — its goals, structure, rules, delays, parameters — arises out of)
Sensibiliser les citoyens à n’utiliser la voiture en ville que si c’est nécessaire.
12 – LA CAPACITÉ DE TRANSCENDER LES PARADIGMES ET DE CHANGER LE MONDE.
(Power to transcend paradigms)
Changer globalement la mentalité de tous les habitants du monde pour qu’ils n’utilisent leurs véhicules qu’en dehors des villes, et prennent systématiquement les transports en commun à l’intérieur de celles-ci.
Attention, il ne faut pas de croire que changer systématiquement de paradigme résout tous les problèmes. Même si tous les moyens sont bons, il faut tenir compte de tous les leviers et agir là où il est pertinent de le faire en fonction du contexte.